Février est, en général, le mois le plus rigoureux de l’année, n’épargnant que les côtes occidentales et méridionales. La venue du froid ne marque pas forcément la mort du jardin. Il faut y préparer ce dernier et assurer sa survie.
C’est généralement le mois le plus froid. Le jour de la Chandeleur (2 février), l’hiver prend fin ou déploie toute sa rigueur. Les grands froids de 1956 et de 1963 ont commencé à la Chandeleur. Le temps qu’il fait ce jour-là doit donc être déterminant pour les travaux de jardinage. S’il pleut, il ne faut pourtant pas se croire hors de danger : vers la fin du mois, on enregistre souvent une brusque recrudescence du froid, qui peut tuer certains bourgeons fragiles et trop prompts à éclore, comme ceux des hortensias.
LES FLEURS D’HIVER
Il faut surtout s’attacher aux fleurs d’hiver, trop ignorées ou trop négligées. Leur floraison, au mois de février (donc en plein cœur de l’hiver), est très précieuse. Elle ne se produit d’ailleurs pas à date fixe, et reste tributaire des intempéries. Entre la fin décembre et le 10 mars, tout est possible.
L’HELLÉBORE
Le langage populaire l’appelle la rose de Noël. C’est une plante vivace, très endurante, au feuillage persistant, et d’un vert très sombre. Ses coroles sont grandes, blanches, d’aspect cireux; marquées de vert chartreuse en leur centre, elles s’ornent d’un cœur jaune pâle et d’étamines jaunes et vertes.
Pour qu’elle se développe convenablement, il faut la placer sous un léger ombrage ou au nord; en forêt, elle pousse spontanément. Il faut placer le plant dans une poche de terreau léger, avec un quart de sable.
L’HAMAMÉLIS
L’hamamélis est un arbuste de terre de bruyère qui déploie ses coroles sur l’écorce
toute nue. Comme toute cette famille de plantes, elle aime le froid et même une ombre légère. Ses fleurs ont la forme d’une trompe contournée et devancent celles du forsythia.
LE CHIMONANTHE PRÉCOCE
C’est également un arbuste de terre de bruyère, qui fleurit à même l’écorce. Ses fleurs sont jaunes et rouges, très abondantes, petites et ont une forte odeur de jacinthe.
LE MIMOSA DU MIDI
Les mimosas, qui poussent presque exclusivement dans le Midi, s’écroulent sous le poids de leurs fleurs au parfum sucré et pénétrant; en terrain neutre et acide, ils se développent très vite. Après leur floraison, il faut les tailler, sinon ils se déséquilibrent très facilement. Comme leur bois est très cassant, le vent risque de les abimer et d’arracher les grands rameaux isolés du reste de l’arbre.
LE DAPHNÉ BOIS-JOLI
Comme la plupart des arbustes à floraison hivernale, ses fleurs éclosent à même le bois. Elles sont couleur cyclamen et forment de petites campanules. Le daphné, qui résiste très bien au froid, n’aime que la terre de bruyère. En Cerdagne,(Pyrénées) il fleurit à côté des plaques de glace, tandis que les premiers narcisses de poète apparaissent.
LE BÊCHAGE DES PELOUSES
Les pelouses que l’on veut refaire doivent être bêchées à fond si on ne l’a pas fait en janvier; la terre doit être remuée et aérée, le gel et le vent nettoient le sol. Il faut bêcher jusqu’à 30 cm, et laisser la terre se tasser d’elle-même.
Les mottes vieillies et les pelotes de racines, qui abîmeraient le sol, doivent être systématiquement arrachées. Une motte de gazon pourrit très lentement et, en pourrissant, forme dans la terre des foyers d’infection. Elle peut même provoquer une véritable maladie, appelée le pourridié, qui entraîne la fermentation et la prolifération des bactéries et fait jaunir le gazon (voir au mois de janvier).
LA PRÉPARATION DES PLANTATIONS EN TERRE DE BRUYÈRE
On utilise de plus en plus les plantes dites de«terre de bruyère. Il est curieux de constater que ces plantes, qui viennent de forêts froides ou de climat tempéré, poussent très facilement dans les jardins urbains. La plupart d’entre elles possèdent un feuillage à limbes persistants, et viennent rompre assez heureusement l’austérité des résineux à aiguilles. Les floraisons des plantes de terre de bruyère sont brillantes, leur maniement aisé, puisque les racines, fines et chevelues, forment une motte de terre homogène, assez solide, que l’on déplace facilement.
Les encaissements diffèrent selon les espèces. La hauteur de la plante doit guider. En haut, un rhododendron; en bas, un hydrangéa ou une azalée de jardin.
UN MATÉRIAU COMMODE
Dans les villes, que les plantations se fassent en terre (quoique le sol urbain soit assez pauvre) ou sur des terrasses, il est nécessaire d’apporter de grandes quantités de terre spécialement préparée. Le prix de la terre dépend de sa quantité, et non pas de sa qualité intrinsèque. La terre de bruyère est
à peine plus coûteuse qu’une bonne terre de maraîchage, et elle est plus légère. Mêlée de tourbe et de sable, elle est sans danger pour les plantes qui l’apprécient. C’est donc un matériau plus « propre » que la forte terre des jardins; son stockage et son transport ne posent pas de problèmes, et elle représente au mètre carré une surcharge inférieure d’un tiers à celle d’une terre classique. Ce dernier point est évidemment capital pour les terrasses.
LE PROBLÈME DU CALCAIRE
Mais l’emploi de la terre de bruyère est malheureusement impossible dans les zones de calcaire actif, même si celui-ci est limité à des simples encaissements dans un jardin par ailleurs fertile. Quand le sol est entièrement remplacé, le problème du calcaire est bien sûr évité. Mais dans le cas de simples encaissements dans des sols très calcaires, des infiltrations de calcaire se produisent nécessairement. Les eaux de pluie, saturées par le calcaire de la terre voisine, imprègnent tôt ou tard la poche de terre de bruyère.
L’arrivée de ce calcaire provoque un jaunissement progressif du feuillage.
Danger qui est évité si le sol entier du jardin est refait sur une épaisseur de 70 à 80 cm, ce qui est très possible dans un jardinet urbain. Il en est de même si on cultive les plantes de terre de bruyère dans des récipients, dans des bacs, des vases posés sur les terrasses, les dallages des cours ou des balcons.
L’ENCAISSEMENT
La quantité de terre exigée par chaque plante est très variable. Il est impossible d’envisager ici tous les cas. Les rhododendrons exigent de 60 à 70 cm de terre de bruyère, les azalées Mollis 60 cm, ainsi que les azalées japonaises, tandis que les azalées naines de Croux exigent 50 cm. Les bruyères se contentent de 40 cm : c’est la profondeur d’encaissement minimale.
Il n’est donc pas nécessaire d’adopter une épaisseur uniforme, sauf s’il s’agit de remplacer partiellement un terrain calcaire; dans ce cas, il faut choisir une profondeur de 60 cm. Il est inutile de chercher à installer à tout prix des plantes de terre de bruyère dans une zone très calcaire. Dans une ville au sol très calcaire, si le jardin est exigu, on peut remplacer toute la terre.
LES PROBLÈMES DE STRATIFICATION
Il ne suffit pas de jeter de la terre de bruyère dans un trou? la cavité doit avoir des flancs verticaux; les trous arrondis vers le fond, ou à parois irrégulières, doivent être évités
ils nuiraient à la qualité du futur sol.
En tenant compte de la hauteur de la couche de terre de bruyère, il faut égale¬ment prévoir une assise de 10 à 15 cm de sable grossier, déposé en lits réguliers au fond de la cavité. Ce drainage a un double but : d’une part, il ménage un espace stérile, où les racines se hasarderont malaisément, et qui les protégera de la couche de terre primitive, souvent peu favorable à la plante; d’autre part, le drainage inférieur assure un écoulement normal des eaux de pluie ou d’arrosage, et évite à la poche de terre de bruyère de se transformer en cloaque, si le sol naturel est lourd et imperméable.
DES ERREURS A ÉVITER
Il faut bien examiner la terre de bruyère quand elle est livrée : parfois elle n’est pas fine, mais se présente sous forme de blocs, de tapons de radicelles mêlées de brindilles, de blocs noirâtres assez durs, de pelotes de tourbe et de mousse sèche, etc. Il est alors nécessaire de concasser les blocs, de les homogénéiser pour obtenir un amalgame régulier. En ajoutant du sable, cette opération est encore facilitée.
Il existe un second type de terre de bruyère, noire, lourde, formée de mottes arrondies, généralement récupérées après le faucardage et le curage d’étangs et de marais. Cette « terre de bruyère » est très fertile, mais doit être amendée de tourbe fine et de sable; sèche, elle met en effet très longtemps à s’imbiber.
Il faut également regarder si la terre n’est pas encombrée par les longues racines noires et raides des fougères mâles. Ce cas est fréquent, et on risque d’avoir la surprise de voir surgir ces plantes sauvages au beau milieu d’une plantation soignée…
Ces erreurs ou ces négligences sont très faciles à éviter, mais elles montrent clairement combien il faut préparer soigneusement ce type de plantation avant la mi-mars, époque à laquelle on met les plantes en terre.
LES DANGERS DE L’EAU
L’eau d’arrosage chargée de calcaire (comme la terre dont elle provient) constitue pour les plantes de terre de bruyère un grave péril. Les bruyères s’y habituent, mais il n’en va pas de même pour les rhododendrons et les azalées. Il ne reste alors qu’une solution, recueillir l’eau de pluie, ce qui pose, on le conçoit, quelques problèmes techniques.